À Propos de LASA2023
América Latina y el Caribe: Pensar, Representar y Luchar por los Derechos
En Amérique latine et dans les Caraïbes, le débat autour de la démocratie s’est diffusé dans les sphères de la production de connaissances malgré l’éloignement géographique et/ou la divergence des perspectives théorico-méthodologiques et des positionnements idéologiques. D’un côté, l’analyse s’est concentrée sur la performance des institutions politiques, notamment au sein de la démocratie électorale. De l’autre, la pensée critique a choisi de dénoncer les failles du système représentatif libéral telles que les inégalités sociales persistantes, la hiérarchie raciale, les relations internationales asymétriques et/ou l’héritage épistémologique colonial ; les déplacements humains, la corruption, la violence et le populisme étant généralement des problématiques subsumées sous les positionnements idéologiques.
La révolution technologique, la démultiplication des pouvoirs et des intérêts planétaires, l’essor de la Chine en tant que grande puissance et le durcissement des inégalités ont changé le monde de manière précipitée. Les systèmes conceptuels, méthodologiques et institutionnels qui nous guidaient encore il y a quelques décennies, ont montré leurs limites et nous empêchent d’avoir une pleine compréhension des événements et d’imaginer des solutions. L’optimisme démocratique du dernier quart du XXe siècle disparait peu à peu ; les réussites sociales et économiques s’étiolent et l’effort de reconnaissance et de respect des populations minoritaires et vulnérables est loin d’avoir abouti.
Il devient donc impératif de repenser les systèmes en plaçant les individus et les droits au centre des réformes. La reconnaissance de la Déclaration universelle des droits de l’homme a permis de grandes avancées à l’échelle mondiale. Sans elle, le monde serait pire. Nous ne pouvons cependant pas ignorer que dans les régions défavorisées et isolées des espaces géo-humains positivement impactés par la mondialisation, la constitutionnalisation joue un rôle relatif dans les difficultés de la vie quotidienne et la défense des droits. Des millions de personnes ainsi privées de leurs droits ont été forcées de migrer, au risque de s’exposer à des situations de vulnérabilité extrême. Le meurtre de défenseurs des droits de l’homme, le féminicide, la violence structurelle, la pauvreté et les exactions subies par la population migrante, au même titre que la destruction de l’environnement, sont des phénomènes d’une cruauté sans pareil dans la région qui requièrent toute notre attention.
C’est à ce carrefour que se trouve la production de connaissances dans notre région : Comment préserver des droits que les institutions ne garantissent pas ? Comment les rendre effectifs dans des contextes où l’inégalité se fait plus forte ? Quelles sont les alternatives lorsque l’État-nation tel que nous le connaissons est incapable de s’attaquer aux dits problèmes ni même aux autres ? Quelle est la capacité de l’Amérique latine et des Caraïbes à intervenir dans un contexte mondial où notre région semble perdre de l’importance ?
On ne peut « penser, représenter et lutter pour les droits » sans y inclure les droits de la nature. Pour ce faire, l’Université doit s’ouvrir à l’interdisciplinarité, à d’autres connaissances et aux voix qui les portent et conserver sa passion pour la compréhension des masses, des mouvements sociaux et des acteurs de la société civile qui participent tout autant que les partis et les gouvernements à la représentation et à la lutte pour les droits. Une Université plurielle peut faire face à la relation nord-sud, dépasser les approches dichotomiques et intégrer les apports de l’activisme sans renoncer à l’autonomie nécessaire à la pensée critique et à la coexistence des voix dissidentes. La lutte pour les droits est inhérente à la lutte pour une démocratie plus participative, solidaire et sociale. En tant qu’universitaires, nous avons le devoir d’y contribuer activement et de la rendre possible.